dimanche 5 juin 2016

VERS L'INTERDICTION DU PORT DU FOULARD ISLAMIQUE DANS LES 28 PAYS DE L'UNION EUROPEENNE

Dans l'affaire C-157-15, l'avocat général Mme Kokott conclut que l'interdiction de porter un foulard islamique en entreprise peut être licite (1).

La Cour de Justice de l'Union européenne aura prochainement à se prononcer sur le recours en interprétation (question préjudicielle) adressé par l'avocat de Mme Samira Achbita, licenciée par son entreprise belge pour avoir revendiqué le droit de porter le foulard islamique(2). Il  est demandé à la Cour de répondre à la question suivante : " L'article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2078/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d'un cadre général en faveur de l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail doit-il être interprété en ce sens que l'interdiction de porter un foulard en tant que musulmane sur le lieu de travail ne constitue pas une discrimination directe lorsque la règle en vigueur chez l'employeur interdit à tous les travailleurs de porter sur le lieu de travail des signes extérieurs de convictions politiques, philosophiques ou religieuses ? "

Le 31 mai 2016, l'avocat général précité a répondu affirmativement à la question posée. 

Quels sont ses arguments ?

2 conditions

1 Un règlement intérieur dans l'entreprise  

Mme Kokott considère que l'on n'est pas en présence d'une discrimination de la salariée dès lors que cette interdiction de porter le foulard islamique, en l'occurrence, s'appuie sur un règlement général de l'entreprise prohibant les signes politiques, philosophiques ou religieux visibles sur les lieux du travail et ne repose pas sur des préjugés ou stéréotypes relatifs à une ou plusieurs religieux déterminées ou aux convictions en général.  

2. Une mesure de la part de l'employeur qui doit être proportionnée. 

Elle précise que cette discrimination peut être légitime dès lors que l'entreprise poursuit une politique de neutralité en son sein en matière de religions et de convictions. Mais, la décision doit répondre au principe de proportionnalité dont le contrôle est confié aux juridictions nationales. En l'espèce, il appartiendra à la Cour de Cassation belge (la plaignante a été déboutée en première instance et en appel) de trouver un juste équilibre entre les intérêts en présence. A savoir, précise t-elle : "... en particulier la taille et le caractère ostentatoire du signe religieux, la nature de l'activité de la travailleuse, et le contexte dans lequel elle doit exercée son activité"

Dans cette affaire, l'avocat général estime que le caractère proportionnel de la mesure (l'interdiction) est rempli car "La procédure devant la Cour n'a en effet pas révélé d'autres solutions qui seraient moins contraignantes mais néanmoins appropriées."

En guise de conclusion, il faut citer in extenso le dernier paragraphe de ce communiqué de presse qui explique bien le fondement de nos sociétés démocratiques. 

" Alors qu'un travailleur ne peut pas "laisser au vestiaire" son sexe, sa couleur de peau, son origine ethnique, son orientation sexuelle, son âge, ni son handicap dès qu'il pénètre dans les locaux de son employeur, on peut en revanche attendre de lui une certaine retenue pour ce qui concerne l'exercice du culte au travail, que ce soit en matière de pratiques religieuses, de comportements motivés par la religion ou, comme en l'espèce, de tenue vestimentaire. L'étendue de la retenue qui peut être attendue d'un travailleur dépend de l'examen global de tous les éléments pertinents du cas de l'espèce". 

Précisons, qu'en droit, la Cour de Justice de l'Union n'est pas tenue de suivre l'avis rendu par l'avocat général. Dans quelques mois, nous saurons quel est le droit positif européen en la matière. 

Notes 


(1) Le communiqué de presse de la CJUE : http://curia.europa.eu/jcms/upload/docs/application/pdf/2016-05/cp160054fr.pdf



(2) Le recours préjudiciel : http://publications.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/7cb1a301-18bd-11e5-a342-01aa75ed71a1/language-fr

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci de faire part de vos remarques et commentaires dans le respect de la loi dans un souci de dialogue constructif et respectueux de chacun.

Philippe DELOIRE