On ne juge pas seulement l'état d'un Etat démocratique à ses institutions et à leur fonctionnement, mais également au sort que cette société réserve aux plus faibles (malades, prisonniers, étrangers, démunis ...).
Au moment ou le premier mandat de Nicolas Sarkozy s'achève dans quelques mois on peut dire que la condition d'étranger (le terme d'étranger est compris comme tout ressortissant non membre de l'Union européenne) en France a reculé sévèrement.
Dans un sens, on aurait pu comprendre que la France s'assure que les étrangers qui séjournent sur son territoire disposent d'un titre en règle, gage de leur insertion légale dans de bonnes conditions. Sur le papier, c'est un raisonnement imparable. Mais, la réalité est toute différente. Car l'immigré sans papiers cela ne désigne pas seulement l'étranger qui franchit clandestinement une de nos frontières pour tenter sa chance à Paris ou ailleurs. L'Etat a lui-même fabriqué des étrangers sans-papiers en ne renouvelant pas des titres de séjour à des étrangers vivant depuis longtemps sur notre territoire en conformité avec nos règles.
1) Une des dernières applications qui défraie la chronique est la fameuse circulaire Guéant qui pose des conditions très restrictives pour permettre aux étudiants étrangers de transformer le titre de séjour étudiant en titre de travail alors même qu'ils possèdent une promesse d'embauche émanant d'une entreprise française qui souhaite s'attirer leurs services. Après sa publication, de nombreux diplômés étrangers, dont certains très qualifiés, qui avaient été recrutés dans des entreprises françaises, n'ont pas pu obtenir un changement de statut (d'étudiant à salarié), un sujet d'inquiétude pour universités et grandes écoles, ainsi que pour le Medef.
Le texte contesté demande aux préfets d'instruire "avec rigueur" les demandes d'autorisation de travail des étudiants, et d'exercer un "contrôle approfondi" des demandes de changement de statut des étudiants étrangers. Elle ne peut se comprendre si on n'a pas en tête que le but de la circulaire est de réduire le nombre d'étudiants étrangers légaux en France de 200000 par an à 180000 selon les affirmations de Claude Guéant.
La pétition signée à partir du site http://www.universiteuniverselle.fr/ par des intellectuels et autres universitaires, entre autres, et le parrainage d'étudiants étrangers pour certains, dont Axel Kahn, candidat à l'élection législative pour le Parti Socialiste dans le 7ème arrondissement de Paris, traduisent une forte mobilisation contre une décision absurde qui nuit aux intérêts ... de la France. En effet, ces étudiants déçus par notre accueil, trouveront du travail dans des entreprises américaines, britanniques, indiennes, chinoises...La France aura investi dans leur formation sans en toucher les bénéfices, mais aura travaillé au profit d'autres pays trop heureux d'accueillir ces têtes bien faites polyglottes. L'engagement du Ministre de l'Intérieur de revoir sa circulaire doit être pris avec prudence, car il peut s'agir d'un simple effet d'annonce assorti de changements cosmétiques, de sorte qu'il conviendra de juger sur pièces le moment venu. La mobilisation étudiante de novembre dernier vient rappeler que les étudiants étrangers resteront vigilants et ne sont pas prêts à quitter le territoire après plusieurs années d'études supérieures réussies dans un établissement d'enseignement supérieur français pour satisfaire à la politique nationaliste du Gouvernement de François Fillon à visée électorale...
"Boucan Guéant" : pour sauver les étudiants... par telesorbonne
2) Dans les Fourberies de Scapin, Scapin s'exclame ; "Mais, que Diable allait-il faire dans cette galère ?" (il s'agit de la galère turque où Léandre est retenu prisonnier). Quel besoin la France avait-elle d'aller se fâcher avec le Grand Turc ? Etait-il urgent de faire voter par l'Assemblée nationale française une proposition de loi de la députée UMP Valérie Boyer, qui fait de la négation des génocides reconnus par la loi française (et du génocide des Arméniens en particulier) un délit passible d'amende et d'emprisonnement ? Cette décision à visée électoraliste consistant à s'attacher le vote des 500000 Arméniens vivant en France est triplement contreproductive.
1) Si elle avait pour but de faire évoluer la Turquie en lui demandant de prendre conscience de son passé tragique et d'évoluer vers la reconnaissance de ce génocide, c'est sans doute raté. Car comme l'indique le Nouvel Observateur," Depuis deux ans, des commémorations publiques ont été autorisées à Istanbul pour marquer le 24 avril, date du début des rafles d'Arméniens par le pouvoir ottoman de 1915. Cet automne, la question arménienne était au centre d'un colloque organisé à Diyarbakir, dans le sud-est à majorité kurde. Avant cela, en 2008, une >demande de pardon aux Arméniens avait recueilli plus de 30 000 signatures." Cette politique de petits pas risque d'être découragée avec ce genre d'admonestation.
2) Les dégâts économiques risquent d'être considérables pour nos entreprises et notre commerce extérieur alors que son solde est fortement déficitaire au regard du gel de la coopération militaire et civile décidée par la Turquie consécutivement au rappel de son ambassadeur à Paris.
3) Plus grave encore, la perte d'image de la France, pays des Droits de l'Homme, qui passe pour un pays anti-musulman et anti-turc. C'est une perte de prestige pour satisfaire une fois de plus à des visées nationalistes. Alors que les Roms ne pouvaient pas se défendre alors même que leurs droits élémentaires étaient bafoués par Nicolas Sarkozy, cette fois-ci, la Turquie fait entendre sa voix. La voix d'une puissance régionale dont l'économie connaît un taux de croissance de 8-9% par an, à la chinoise, qui n'entend pas se laisser faire ! Derrière les outrances consistants à assimiler les exactions commises par la France durant la guerre d'Algérie à un génocide se cache un orgueil national blessé car c'est toute la société turque qui se sent visée par cette arrogance française d'autant plus incompréhensible que la France n'a pas été partie prenante dans ce conflit entre l'Arménie et la Turquie en 1915 et elle ne compte pas de victimes à ce titre. Chacun son métier ! Il faut laisser l'histoire aux historiens et la politique aux policitiens. Le mélange des genres peut conduire à un résultat funeste. Cette humiliation de la Turquie a été précédée du refus manifesté par Nicolas Sarkozy, exprimé durant la campagne présidentielle de 2007, de voir adhérer la Turquie à l'Union européenne comme l'indique Xavier Bertrand, Ministre du Travail, de l'Emploi et de la Santé, dans cet interview. Cela commence à faire beaucoup aux yeux des turcs et on peut les comprendre ...
Pas question que la Turquie adhère à l'Europe par Richard-MALLIE
En refusant de voir ce que l'étranger peut apporter à la France et en le montrant du doigt pour des raisons idéologiques Nicolas Sarkozy s'est fait de nouveaux ennemis dont la France n'avait pas besoin.
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Philippe DELOIRE