Allocution de François Bayrou - 1er tour -... par bayrou
Ce jeudi 3 mai, François Bayrou a fait savoir qu'il voterait personnellement en faveur de François Hollande. Il explique ce choix par la campagne du second tour de Nicolas Sarkozy qui a chassé ouvertement sur les terres du Front National au point d'en épouser un certain nombre de thèmes ou de thèses en mettant en avant la maîtrise de l'immigration, les thèmes sécuritaires ou en se prononçant pour la perpétuité réelle qui figure dans le programme du Front National.
François Bayrou votera pour François Hollande par LCI
1. Un choix courageux.
Tout aurait du conduire François Bayrou, comme 5 ans plus tôt, à ne pas choisir entre les deux protagonistes du second tour et à appeler ses électeurs à voter blanc. C'eût été logique, l'introuvable Centre se trouvant géométriquement et politiquement à égale distance entre le Droite et la Gauche.
Mais, le choix du leader du Modem s'explique bien par l'attitude du Chef de l'Etat qui a abaissé la fonction et s'est livré à un abus de pouvoir, selon le titre du livre de François Bayrou paru en 2009, chez Plon (l'éditeur du Général de Gaulle).
François Bayrou écrivait : " Le président de la République a un plan. Il conduit la France là où elle a toujours refusé d’aller. L’abandon du modèle républicain, le culte de l’argent, le choix d’une société d’inégalités, le renoncement à ce qui faisait la force et l’originalité de la France dans le monde. Partout, la France se range du côté des puissants. En même temps, tous les centres de décision, politiques, économiques, médiatiques sont convoités et mis en réseau. L’arbitraire règne en maître. Jamais démocratie ne porta plus mal son nom. Jamais République ne fut pas moins publique."
C'est donc bien sur le terrain des valeurs que s'est situé François Bayrou. C'est bien pire qu'un choix partisan contre Nicolas Sarkozy. C'est l'affirmation selon laquelle les valeurs de la République sont menacées par l'attitude du Chef de l'Etat. Qu'il y a au dessus du combat partisan, des valeurs de vie en communauté entre Français qui doivent être sauvegardées. Tout le contraire de la vision manichéenne du Chef de l'Etat en opposant les bons aux méchants, l'étranger perçu comme une menace en désignant les Musulmans, sans le dire expréssement, au point d'avoir organisé au sein des préfectures un funeste débat sur l'identité nationale qui s'acheva dans le chaos et l'exaspération.
On comprend d'autant mieux l'attitude de François Bayrou, que comme une antidote à la dérive sarkozyste, il a mis en avant la moralisation de la vie publique et la nécessité de limiter le poids de la dette, deux points essentiels pour lui, à propos desquels François Hollande a formulé plusieurs propositions parmi les 60 qui constituent son programme.
C'est dire, que François Bayrou est prêt à quitter son bord qui a constitué son histoire politique pour mettre au dessus ses convictions politiques quand l'essentiel est en cause, ce qui constitue un choix courageux.
2. Un choix cohérent.
Ce choix personnel n'engage que lui-même, laissant libre les membres du MoDem et ses électeurs de choisir le candidat qui recueillera leurs suffrages. Ainsi, il ne nuit pas à l'unité de son parti en faisant vivre "la diversité" des opinions selon sa propre expression.
La cohérence, tient aussi que sa critique du Sarkozysme le conduit à franchir la dernière marche en coupant les amarres, à un moment politique où on sent bien que François Hollande, sauf surprise, est à quelques jours de devenir Président de la République.
On devine qu'il ne s'agit pas d'un ralliement, ni la recherche pour lui-même, même si peut-être quelques membres dirigeants de son parti seront tentés par une aventure gouvernementale qui ont clairement fait savoir qu'ils voteraient pour François Hollande.
3. Dépasser la logique des camps politiques ?
C'est ce côté panache propre à Henri IV, dont il a écrit une biographie, qui plaira se retrouvant enfin lui-même faisant mentir la phrase du Cardinal de Retz dans ses mémoires, chère à François Mitterrand selon laquelle "on ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment". Ce 3 mai 2012, il en sort à son avantage. Là où Henri IV s'exclamait "Paris vaut bien une messe", pour faire prévaloir l'unité nationale dans un climat de guerre de religions que la Saint-Barthélémy le 24 août 1572 avait porté à son paroxysme, François Bayrou peut dire qu'il croit à une France nouvelle qui transcende les clivages partisans.
Les réactions outrées de la Droite et de Nicolas Sarkozy montrent que les anciens amis politiques de François Bayrou se situent dans une logique d'appareil politique et d'appartenance à un camp. Ce n'est sans doute pas dans ce camp là que viendra la recomposition du paysage politique français appelé de ses voeux par François Bayrou...
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4. De quelques précédents.
On pense au "Oui, mais" de Valéry Giscard d'Estaing, lors du référendum de 1969 qui contribuera au départ du Général de Gaulle du pouvoir. Mais, également, au fait qu'en 1981, le Marie de Paris, Président du RPR, Jacques Chirac, indiquait qu'à titre personnel il voterarait en faveur du président de la République sortant, Valéry Giscard d'Estaing; autrement dit, une manière de laisser entendre que les membres du RPR et les électeurs pouvaient apporter leurs voix à la candidature de François Mitterrand, ce qui ne manqua de se produire puisqu'un million de voix firent défaut, le 10 mai 1981, à l'égard de celui qui pensait être réélu et très longtemps ignora cette date.
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Philippe DELOIRE