vendredi 6 juin 2014

LE TARIF DE SOUTIEN A L'EOLIEN ANNULE POUR LA SECONDE FOIS PAR LE CONSEIL D'ETAT : QUIELLES CONSEQUENCES ?






Dans son arrêt du 28 mai 2014, N° 376501, ECLI:FR:CESSR:2014:376501.20140528
Publié au recueil Lebon, Mme Natacha Chicot, rapporteur, le Conseil d'Etat a annulé le tarif de rachat par EDF auprès des producteurs d'énergie éolienne.
Ce faisant, il a pris en compte
l’arrêt du 19 décembre 2013 par lequel la Cour de justice de l’Union européenne avait répondu à une question préjudicielle adressée par le Conseil d’Etat, dans son arrêt du 15 mai 2012. Il demande à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) de se prononcer sur le statut d'aide du mode de financement du surcoût de l'électricité éolienne. La CJUE qualifie ce mécanisme d'aide publique au sens du droit communautaire, ce qui implique que l'aide communautaire soit notifiée par le Gouvernement à la Commission européenne. Or, en l'occurrence,le tarif de 2008 n'avait pas été notifiée à la Commission européenne par le gouvernement de l'époque. Pour ce motif, la Haute Assemblée juge que
" l'arrêté du 17 novembre 2008 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent et l’arrêté du 23 décembre 2008 le complétant sont annulés". 


La sécurisation du tarif bonifié.

La décision avait été largement anticipée et préparée par le gouvernement. Dès octobre 2013, l’exécutif avait notifié un nouveau tarif à Bruxelles, et celui-ci avait annoncé fin mars 2014 qu’il autorisait les aides d’état en faveur de l’éolien. La Commission européenne a donné le 27 mars dernier son feu vert aux aides accordées en France pour la production d’électricité par des éoliennes terrestres, à la suite de la procédure de notification du dispositif de soutien engagée par Paris;début 2013,  pour en faire reconnaître la légalité. Le gouvernement pourra donc prendre un nouvel arrêté tarifaire, éventuellement avec effet rétroactif. «Toutes les conditions sont donc aujourd’hui réunies pour permettre la publication d’un nouvel arrêté tarifaire compatible avec les lignes 

La ministre de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie, Ségolène Royal, a saisi, dès le 19 mai, la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) sur un projet de nouvel arrêté tarifaire, avec un niveau de tarif identique. Le Conseil supérieur de l’énergie a approuvé, mercredi 4 juin, le projet d’arrêté qui va renouveler les tarifs de rachat de l’éolien. Sa publication dans les prochains jours devrait mettre fin à un imbroglio juridique qui a lourdement pénalisé la filière française.

Les questions en suspens. 

1)  Les clients d'EDF doivent-ils subventionner l'installation des éoliennes par les opérateurs privés ?

EDF rachète 82 euros le mégawattheure (MW) d’éolien terrestre (contre 50 euros pour le prix de gros sur le marché). . Il coûte très cher aux consommateurs, comme le souligne Vent de colère, ainsi qu’EDF. Une part croissante de la Contribution au Service Public de l’Electricité (CSPE) – 60 % en 2014 – payée par les consommateurs va en effet au financement du rachat obligatoire par EDF de l’électricité produite par les éoliennes et les panneaux photovoltaïques, le reste finançant la péréquation tarifaire entre régions (26,7 %), la cogénération chaleur-électricité (7,4 %) et les tarifs sociaux (5,7 %). La CSPE représente désormais 13 % d’une facture moyenne.

Le  tarif  éolien  a déjà été annulé en 2008, suite à une première requête  en Conseil d'Etat déposée  par les associations Vent du bocage  et  Vent de Colère. Il avait été ensuite et rétabli par Jean-Louis Borloo, ministre de l’environnement. Attaqué à nouveau par l'association Vent de Colère devant le Conseil d'État et la Cour Européenne  de justice de l'Union européenne, le tarif contesté a été annulé pour la seconde fois, le 28 mai 2014. .

Doutant de la pérennité du tarif de rachat, les banques refusaient de financer les projets. Un redémarrage s’est produit en 2013, « grâce à un nouveau modèle de contrat négocié avec EDF », indique FEE. Des contrats pour 870 MW d’éolien terrestre ont été signés entre avril et octobre. Mais 500 MW seulement ont été raccordés au réseau cette année, bien moins que les années précédentes, reconnaît-on chez EDF Energies nouvelles. La question de la fixation du tarif d'achat ou de tout autre mécanisme de soutien n'est pas anecdotique, car la filière éolienne française en dépend.

Ira-ton vers une troisième annulation par le Conseil d'Etat du tarif de l'éolien ?

En effet, l'association Vent de colère prévient qu'elle se dressera contre le nouvel arrêté tarifaire sur le rachat de l'électricité issue de l'énergie éolienne, s'il est dans la ligne de l'ancien.

L'association Vent de Colère développe une critique radicale  à propos de la naissance d'une industrie de l'éolien en France. Sur son site, on peut lire : "Bâti sur plusieurs contre vérités, l'éolien industriel n'a, en France, d'intérêt ni économique, ni énergétique, ni écologique, pas d'avantage social.  C'est pourquoi, compte tenu de ses multiples nuisances, nous nous opposons à tout éolien industriel, dont la seule raison d'être est l'enrichissement garanti des promoteurs, aux dépens des consommateurs et des contribuables français et au détriment des économies d'énergie, de la recherche et du développement des autres énergies renouvelables"

Dans le même sens :   "Ces tarifs d'achat de l'électricité - qui sont artificiels - cela fait 20 ans que l'industrie éolienne vit que de tarifs subventionnés sous le prétexte d'une industrie en développement", argumente Jean-Louis Butré, président de la Fédération Environnement durable.

2) Vers une autre solution ?

 Vent de colère rappelle cependant que le 9 avril, la Commission européenne a adopté des règles qui vont aboutir à limiter les aides publiques à certaines sources d'énergies renouvelables, privilégiant notamment le système de primes de rachat plutôt que de tarifs fixes bonifiés. Ce n'est pas la voie que le Gouvernement a choisi.

 3) Quelles conséquences pour les opérateurs ?

Le Conseil d’Etat n’a toutefois pas demandé aux producteurs d’énergie éolienne de rembourser les aides perçues, ni - comme le souhaitait le rapporteur - d’acquitter les intérêts qu’ils auraient dû verser s’ils avaient dû emprunter la différence entre le montant des aides et les prix du marché.

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Philippe DELOIRE