mercredi 4 novembre 2009

L'IDENTITE NATIONALE AU DEFI DE LA CITOYENNETE EUROPEENNE.



Le débat engagné le 2 novembre 2009, par le Gouvernement sur le thème de l'identité nationale visant à répondre à la question "Qu'es-ce qu'être français ? me conduit à proposer ma vision de cette question, à travers deux affirmations.


Premièrement, cette identité nationale, à supposer qu'on parvienne à la définir, est largement européanisée. L'Union européenne tient, par définition, une grande place dans nos vies, sans que nous en soyons conscient. Aussi, sans le savoir, comme Monsieur Jourdain faisait de la prose sans le savoir, notre identité est au moins franco-européenne.


Il faut respecter la loi française nous dit-on. Bien sûr, sauf que, techniquement parlant, l'essentiel des textes votés par le Parlement français provient de l'Union européenne, soit qu'il s'agisse de règlements directement applicable ou de directives transposées dans l'ordre juridique national.


Il faut respecter le drapeau français. Mais, le plus souvent, lorsque le Président de la République prononce un discours, flotte à ses côtés le drapeau européen.


Si être français, c'est célébrer l'unité nationale le 14 juillet, c'est aussi, penser à l'action des Pères fondateurs de l'Europe, à travers la Déclaration Robert Schuman du 9 mai 1950.


Etre français, c'est ce reconnaître dans les valeurs de la République et appartenir à la Patrie des Droits de l'Homme. Mais, en tant que membre de l'Union européenne, les Etats ont rédigé la Charte des Droits Fondamentaux qui est plus complète que la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen en intégrant, notamment les droits de l'Homme de la troisième génération - droit à l'environnement, lois bioéthiques...).


Etre français, c'est disposer de la liberté d'aller et venir. Mais, celle-ci ne s'arrête plus aux frontières hexagonales. L'Union européenne a mis en place la liberté de circulation des personnes dont le premier signe tangible est la suppression des contrôles physiques au frontières depuis 1993, mais aussi la possibilité de s'établir et de travailler dans les 26 autres pays de l'Union en étant traité comme le national du pays d'accueil.


Etre français, c'est aussi, monter des projets avec le concours de fonds européens, quand un secteur économique comme l'agriculture, n'est pas entièrement subventionné par le budget de l'Union européenne, à hauteur de 40%.


Etre français, c'est appartenir à l'Union européenne, ce qui signifie disposer d'une voie de recours supranationale qui s'impose aux décisions des Etats membres. Cela signifie pour l'UE saisir le Tribunal de Première Instance ou la Cour de Justice, la Commission européenne, le Parlement européen, le Médiateur européen ou la commission des pétitions. Et c'est obtenir la possibilité que la France réforme ou retire sa décision en application d'un texte qui s'impose à elle.


Enfin, être français, c'est après avoir voyagé en Europe, revenir au pays en sachant mesurer ses atouts et faiblesses, non pas en soi, de manière absolue, mais de façon relative, au vu des situations rencontrées. En politique, c'est une méthode nommée benchmarking ou étalonnage qui permet de mesurer la situation relative des Etats les uns par rapports aux autres et à partir de ce bilan mesurer les efforts qu'ils accomplissent comme lors de la mise en oeuvre de la stratégie de Lisbonne par exemple (2000-2010). C'est, en mot, comme en cent, s'enrichir de l'expérience des autres Européens, de leurs analyses, de leurs pratiques.


Si l'identité nationale consiste à imaginer une France repliée sur elle-même, sûre d'elle même et donneuse de leçons, je ne me reconnais pas dans celle-là. La France que j'aime est tout son contraire, parce que la diversité n'est pas une menace, mais une chance, quand on sait dialoguer et que l'on n'a pas peur de l'autre.


Deuxièmement, ce débat là cache un autre débat qui a trait uniquement à la manière dont la France accueille les étranges - hors ressortissants de l'Union européenne- sur son territoire.


Ce qui est frappant, lorsqu'on se rend sur le site du débat sur l'identité nationale, c'est de regarder les deux premières propositions, émanant du Ministre Eric Besson, chargé de l'Immigration et de l'Identité Nationale. La première est la suivante que je fais figurer, in extenso, avant de la commenter.


"Faire connaitre et partager l’identité nationale. 31/10/09


Notre Nation s’est constituée au fil des siècles par l’accueil et l’intégration de personnes d’origine étrangère. Ce grand débat doit permettre de valoriser l’apport de l’immigration à l’identité nationale, et de proposer des actions permettant de mieux faire partager les valeurs de l’identité nationale à chaque étape du parcours d’intégration. Comment mieux faire partager les valeurs de l’identité nationale auprès des ressortissants étrangers qui entrent et séjournent sur le territoire national ?


Mettre en place un contrat d’intégration républicaine pour les étrangers entrant et séjournant sur notre territoire, passant par une élévation du niveau de pratique de la langue française et de connaissance des valeurs de la République, pouvant consister en un renforcement du Contrat d’Accueil et d’Intégration existant.


Mettre en œuvre, sur la base du volontariat, un parrainage républicain, permettant aux ressortissants étrangers d’être accompagnés dans leur parcours d’intégration.


Ouvrir aux parents les écoles dans lesquelles sont scolarisés les enfants afin de les familiariser aux valeurs de la République, sur le modèle du dispositif expérimenté cette année dans 31 départements.


Comment mieux faire partager les valeurs de l’identité nationale auprès des ressortissants étrangers qui accèdent ensuite à notre communauté nationale ?


Mettre en place un contrat avec la Nation, passant par un entretien d’assimilation permettant de s’assurer d’un meilleur niveau de pratique de la langue française et de connaissance des valeurs de la République.


Mettre en œuvre une cérémonie plus solennelle lors de toute accession à la nationalité française, par naturalisation, par déclaration, ou par accès automatique à la majorité, et la création d’une nouvelle voie d’accès à la nationalité française pour les personnes qui ont accompli des efforts exceptionnels d’intégration."


C'est limpide. Il s'agit de s'assurer, par différents moyens, que l'étranger s'intégrera bien en France. Il signera un contrat d'intégration républicaine- le terme de contrat est discutable, car les deux parties ne sont pas à égalité - en passant un entretien d'assimilation, pouvant être parrainé, avant de se voir féliciter officiellement de ses efforts, lors d'une réception solennelle.


Bref, il faudra qu'en peut de temps il assimile - sans jeux de mots - nombre d'informations pour pouvoir prétendre appartenir à la Communauté nationale.


Les immigrés qui sont venus travailler en France, leur intégration s'est effectuée progressivement par le travail, en fondant une famille, en étant membre d'associations, en devenant amis autour d'un verre dans un café. Naturellement, au fil des ans, quand leur fierté c'était précisément de ne plus se distinguer de celles et ceux qui les avaient précédés sur le sol français.


Ce que cache ce débat, c'est la volonté de mettre sur la place publique la question de l'intégration des populations maghrébines et africaines et tout particulièrement la manière dont l'Islam peut se conjuger avec les principes républicains. Islam de France ou Islam en France ?


Du reste, si vous avez la curiosité de regarder les vidéos proposées sur le site consacré au débat sur l'identité nationale, vous observerez que c'est bien ce thème qu'évoque Jean-François Copé, Président du Groupe UMP, à l'Assemblée Nationale. Il distingue 4 problèmes majeur, dont le 4 ème vise à s'interroger afin de répondre à la question : "Qu'es-ce qui fait que le méthode d'assimilation a réussi au début du 20 ème siècle et que le méthode d'intégration des années 60, 70, 80, est globalement un échec, même si, ici ou là, il y a de magnifiques réussites."


Enfin, l'interview donné par Alfred Grosser dans la République du Centre du 5 novembre est instructive, s'agissant d'un homme pétri de culture franco-allemande. Il dit : "Si on reparle autant de nation, c'est parce qu'on ne veut pas véritablement ouvrir de débat sur l'accueil des étrangers. Parler de nation, c'est aussi dire, au fond, les étrangers n'en font pas partie, du moins à la première génération. En Allemagne, un député d'origine turc reste un Turc, avec un passeport allemand. "


Pendant 3 mois, jusqu'au 4 février le débat sera alimenté par de nombreuses contributions. Il ne faut pas hésiter à s'en emparer pour apporter des idées d'ouverture, de respect et de tolérance.

Pour se faire une idée des arguments échangés, on peut se reporter aux 3 liens qui concluent cet article. Le premier est le site du Grand Débat sur l'Identité Nationale. Le second est la vidéo de la présentation de cette question par Arte. Le troisième est le débat qui s'est déroulée sur ce thème lors de la dernière émission d'Yves Calvi, en présence du Ministre de l'Immigration et de l'Identité Nationale et de nombreux contradicteurs.

http://www.debatidentitenationale.fr/

http://www.arte.tv/fr/Videos-sur-ARTE-TV/2151166,CmC=2923660.html?tab=tab_all&page=1&sort=1&ascending=false

http://info.francetelevisions.fr/video-info/index-fr.php?id-categorie=EMISSIONS_MOTS_CROISES

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Philippe DELOIRE